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“LE TEMPS DE LA PROFESSIONNALISATION EST ARRIVE“

YVES HEIRMAN (DIRECTEUR DE LA FBEP-BFG) NOUS PARLE DES EVOLUTIONS DU SECTEUR

Selon Yves Heirman, directeur de la Fédération Belge des Entrepreneurs Paysagistes, nous avons besoin de professionnels. “Le métier d'entrepreneur de jardin a beaucoup changé depuis vingt ans, mais la perception des clients n'est pas encore à jour. Beaucoup d'entrepreneurs de jardin sont des indépendants qui travaillent dur sans pouvoir répercuter suffisamment leurs prix. S'ils demandent 40 euros de l'heure, les gens trouvent ça trop cher, alors que d'autres groupes professionnels peuvent demander le double. L'adaptation prend du temps. C'est pourquoi nous préconisons la stabilité et la lutte contre la concurrence déloyale.“

Le métier d'entrepreneur de jardin a beaucoup changé

UN SECTEUR QUI EVOLUE

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La Fédération Belge des Entrepreneurs Paysagistes (FBEP-BFG) a été créée en 2005, suite à la fusion de plusieurs associations du secteur du jardinage. Elle est dirigée par Yves Heirman depuis 2012. “Autrefois, le secteur était beaucoup plus petit. De 950 employeurs en 1995, il est passé à 3.000 en 2018. Le nombre d'entreprises individuelles a augmenté encore plus fortement. La complexité du secteur a entraîné un besoin accru d'organisation. La FBEP a été créée pour y répondre. Nous faisons la promotion de l'entrepreneur de jardin, nous essayons d'influencer la politique et nous organisons beaucoup d'activités. Personnellement, je n'ai aucune expérience en matière de jardinage. Mais c'était un choix de la FBEP. Je suis économiste de formation et j'ai un passé dans le monde informatique. S'il y a bien deux sujets dans l'air du temps, c'est l'économie et la transformation numérique. Tout devient si complexe que le travailleur autonome ne peut plus tout faire tout seul: travail, prospection, comptabilité, publicité, réseaux sociaux, … La fédération est là pour le soutenir.“

La végétation est (devenue) une nécessité

Pourquoi le secteur s'est-il autant développé? “La végétation était considérée comme quelque chose de gratuit; les gens hésitaient à payer pour ça. Aujourd'hui, on réalise que la verdure est une nécessité … et qu'il y en a de moins en moins. C'est valable aussi bien dans les zones rurales que les zones urbaines. Si chaque arbre et chaque buisson de votre ville devait disparaître, vous seriez mort. Cette prise de conscience se développe, en partie grâce aux fédérations belge et européenne. Une deuxième raison est que la végétation est passée d'un fardeau à un investissement. Les gens commencent à réaliser que la verdure augmente la valeur d'une maison ou d'un environnement. Les particuliers considèrent le jardin comme un espace supplémentaire dont ils peuvent profiter. Le gouvernement aussi se rend compte que la végétation se récupère largement, car elle améliore la qualité de vie et stimule d'autres activités, telles que l'horeca. Enfin, il y a le déclin des connaissances. Dans quelques années, il y aura plus de citadins dans le monde que de non-citadins. Il y a quarante ans, tout le monde avait dans sa famille un agriculteur ayant une certaine connaissance de la végétation. Ce n'est plus le cas. D'où la nécessité accrue d'un professionnel du jardin. La demande a aussi changé. Il y a vingt-trente ans, on disait: “Ma haie et mon herbe sont trop hautes. Vous pouvez arranger ça? Aujourd'hui, la question que se posent les gouvernements, est: “Pouvons-nous favoriser l'inclusion sociale dans nos villes par le biais d'un parc public? C'est une question complètement différente."

Espaces verts

Davantage d'espaces verts

“Nous plaidons activement pour des espaces verts plus nombreux et de meilleure qualité. Notre secteur a la chance d'offrir un service qui a du sens: plus il y a de végétation, plus c'est bon. Mais il faut la gérer judicieusement.
Il ne sert à rien de placer dans une rue commerçante des arbres qu'il faudra enlever l'année suivante, parce que personne n'a souligné le fait que les trous sont trop petits ou que l'espèce choisie ne convient pas. Pour ça, il faut un professionnel.“

L'europe

Heirman a été directeur de l'European Landscape Contractors Association (ELCA) de 2016 à 2017. La mission consistait à déplacer le siège de l'ELCA de l'Allemagne à Bruxelles. Désormais, le bureau se trouve juste en face du bâtiment Berlaymont à Bruxelles. “En collaborant avec les pays voisins, on peut anticiper les problématiques. Nous avons pu annoncer la pyrale du buis un an à l'avance. Nous pouvons tirer des leçons de la manière dont les pays voisins gèrent les sécheresses ou les problèmes tels que la phytolicence. Souvent, l'entrepreneur de jardin ne voit pas tout ça. Il fait son travail - et c'est normal - mais sans cette fédération, le secteur du jardinage ne serait pas ce qu'il est aujourd'hui. Comme de plus en plus de décisions sont prises au niveau européen, il est important d'avoir une voix à ce niveau-là. J'aimerais qu'un maximum d'entrepreneurs de jardins rejoignent l'ELCA, afin que l'Europe puisse voir que les entrepreneurs de jardins forment un secteur. Tout le monde parle du secteur automobile, de la construction ou des produits chimiques, mais qui considère l'aménagement et l'entretien de jardin comme un secteur? Les gens ne sont pas encore conscients de la taille du secteur du jardinage.“

 

PROBLEMATIQUES

Les prix sont trop bas

“Beaucoup d'entrepreneurs de jardinage sont des indépendants qui travaillent dur sans pouvoir répercuter suffisamment leurs prix. Les gens trouvent normal que d'autres professions demandent 70 euros l'heure, mais si un entrepreneur de jardin demande 40 euros de l'heure, ils trouvent ça trop cher. En outre, n'importe qui peut se mettre à jardiner. Ceci dit, ce n'est pas forcément un problème, car s'il s'agit d'un bon entrepreneur de jardin, cela en fait un de plus à rejoindre nos rangs et la demande est suffisamment grande. En revanche, on voit beaucoup de 'cow-boys' se lancer. Ces gens travaillent pour 25 euros de l'heure, si bien qu'il est encore plus difficile pour les autres de demander 35 euros de l'heure. Le fait de permettre aux gens de gagner jusqu'à 500 euros par mois en franchise d'impôt est parti d'une idée noble, mais cela ouvre la porte à des prix encore plus bas pour le secteur des jardins. S'il y a mille personnes qui travaillent en complémentaire, cela fait un chiffre d'affaires de six millions d'euros qui ne va pas aux professionnels. Mais ce n'est même pas le plus gros problème. Le problème, c'est que ces bricoleurs travaillent souvent en dessous du prix et exercent leur métier sans savoir ce qu'ils font. Tout le monde est convaincu que la végétation offre des solutions dans divers domaines: qualité de l'air, absorption de l'eau en cas de fortes pluies, inclusion sociale et même lutte contre l'obésité - les parcs et les terrains de football offrent de la place pour bouger - mais personne n'est prêt à mettre le prix normal pour ça. Pourquoi? Parce qu'on a l'impression que n'importe qui peut le faire. Mais c'est raisonner comme il y a vingt ans! N'importe qui peut tondre une pelouse, mais tout le monde ne peut pas concevoir un jardin capable d'accueillir 3.000 personnes par an. J'ai visité un projet impressionnant, avec des chevaux. Le client voulait absolument un certain type de buisson, mais l'entrepreneur de jardin, une personne un peu timide, l'en a dissuadé. Il a dû insister énormément jusqu'à ce que le client ait l'intelligence de lui demander pourquoi. La réponse était simple: “Si vos chevaux en mangent, ils meurent.“ C'est ça, le professionnalisme. Et je n'hésite pas à dépenser de l'argent pour ça.“

Les prix sont trop bas

Anomalie TVA résolue

“L'entrepreneur de jardin souffre d'une anomalie au niveau de la TVA. Si un particulier achète ses plantes directement, il paie 6% de TVA. Si elles figurent sur la facture d'un entrepreneur de jardin, la TVA est de 21%. Alors, il va passer commande lui-même chez un fournisseur. Puis, il demande à son entrepreneur de jardin de lui livrer sa commande. L'entrepreneur est obligé de répondre qu'il n'est pas autorisé à effectuer du transport pour des tiers. Le client est donc confronté à un dilemme. Il serait ridicule de faire appel à un transporteur, car il perdrait l'avantage TVA. Alors, il va trouver une personne peu regardante au niveau des règles et c'est l'image de la profession qui en pâtit. C'est contre ça que nous luttons. Et aujourd'hui, la réduction du taux de TVA de 21% à 6% a été approuvée par la Commission des Finances du Parlement fédéral, en partie grâce aux efforts de notre association et de la députée Rita Gantois."

Modification des règles

“Les transitions se succèdent de plus en plus vite. Le changement est le mot à la mode, aujourd'hui. Or, quand on travaille avec du matériel vivant, on a plutôt besoin de stabilité. Parfois, en tant que fédération, nous devons lever le pied. La numérisation, la phytolicence, le GDPR: ce sont là des changements majeurs et s'ils se succèdent trop vite, ils tueront les petites entreprises. Je reçois quotidiennement des appels pour interroger mon secteur. Ce n'est pas possible, car ces gens-là bossent dur. On constate que de nombreuses responsabilités sociétales sont transférées aux entreprises. Education sociale, économie sociale, ... ce sont de nobles objectifs, mais il faut être capable de les gérer en tant qu'entreprise. Etant donné la croissance rapide de notre secteur, nous devons être attentifs aux difficultés de croissance. Le temps de la professionnalisation est arrivé, mais il faut laisser le temps à l'entrepreneur de jardin de s'adapter. Nous essayons de l'aider à cet égard.“

Nombre d'entrepreneurs de jardin en FlandreConcurrence déloyale

“Un exemple est le plan pour une concurrence loyale. L'entrepreneur était stigmatisé à cet égard. Nous avons explicitement indiqué que les travailleurs et les clients doivent également être sensibilisés. Si le travailleur ne demande pas à être payé en noir, l'employeur ne le fera pas. Si le client ne demande pas de travail au noir, aucun entrepreneur de jardin ne va le faire, car cela lui causerait plus de problèmes qu'autre chose. Et si le gouvernement ne lance pas de marchés publics à 25 euros de l'heure, il ne faut pas chercher toutes sortes d'astuces pour que cela se fasse à ce prix-là.“

Garantie des plantes

La sécheresse de l'été dernier a causé des problèmes aux entrepreneurs de jardin, qui ont dû remplacer plein de plantes gratuitement. “Il faut distinguer les commandes privées et les commandes publiques. Les entreprises de jardinage spécialisées dans les marchés publics sont tenues de fournir une garantie. Mais le gouvernement dit aussi que vous ne pouvez pas arroser, alors vos plantes mourront de toute façon. Dans ces conditions-là, ça devient difficile et l'entrepreneur se retrouve dos au mur. C'est pourquoi nous insistons pour que l'obligation de garantie soit annulée pour 250 situations exceptionnelles, comme l'été dernier, dans le cahier des charges type. Nous pouvons aider les entrepreneurs qui réalisent principalement des missions privées en leur faisant prendre conscience que les garanties ont un coût. De nos jours, on accorde souvent une garantie de plantes sans réfléchir. Mais quel en est le coût? Le volume multiplié par la probabilité du risque. Si vous placez 100 arbres et que la probabilité qu'il y ait un problème, est de 2%, vous devez facturer le coût de 102 arbres. Vous pouvez estimer ces risques en examinant ce qui s'est passé au cours des dix dernières années. Ensuite, faites une moyenne. Cela dépend aussi des espèces végétales utilisées: quelqu'un qui se spécialise dans le buis, courra un risque différent. On peut difficilement blâmer le petit entrepreneur de jardin pour son manque de professionnalisme entrepreneurial. Il n'a pas de bureau avec deux personnes pouvant tout estimer. Mais c'est pour ça que nous sommes là et que nous insistons sur de meilleurs prix. Si vous ne pouvez pas répercuter les coûts, vous n'avez pas de budget et vous ne pouvez pas faire face aux revers. Dans ce cas, votre modèle d'entreprise n'est pas à l'épreuve de l'avenir - c'est l'économiste qui parle (rires). C'est dommage: beaucoup de jeunes qui commencent, doivent arrêter au bout d'un certain temps, parce qu'ils subissent un revers financier. Nous voulons éviter cela. Nous voulons transmettre cet esprit d'entreprise afin de renforcer l'ensemble du secteur.“

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Écrit par Stefan Acke

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