“AUCUNE RAISON DE DIMINUER LES INSPECTIONS DE CONTROLE DES FUITES"
Double entretien avec charge de mission et controleur du gouvernement flamand

Les techniciens frigoristes sont difficiles à trouver et rares à rejoindre le marché du travail. Or, il en faut un très grand nombre, car les installations de refroidissement se retrouvent dans tous les secteurs et la problématique des réfrigérants n'est pas résolue. Le gouvernement s'engage dans les inspections des contrôles de détection des fuites et continue d'inscrire ce thème climatique à l'agenda politique, une bonne nouvelle pour les techniciens frigoristes qui exécutent ces contrôles. “En effet, ils luttent en première ligne contre les installations qui fuient", affirment le chargé de mission Sven Claeys et le Contrôleur d'Appplication Katelijne Schaerlaekens.
Que dit la législation actuelle sur l'utilisation des réfrigérants et installations hfc?
Sven Claeys: “Les conditions d'exploitation de ces installations sont fixées dans le Règlement européen 517/2014, qui est directement applicable dans tous les Etats membres européens. Les législations flamande, wallonne et bruxelloise y font référence. Il fixe notamment la fréquence des contrôles d'étanchéité aux fuites obligatoires, depuis que l'on sait que les réfrigérants HFC ou mélanges HFC sont nocifs pour l'environnement, parce qu'ils contribuent fortement au réchauffement de la terre. L'émission de 1 kg R404A, un réfrigérant HFC très utilisé, équivaut à l'émission de 3,9 tonnes de CO2. Pour déterminer cette fréquence, le contenu de l'installation de refroidissement a été considéré; aussi bien la quantité que sa nature. La toxicité pour l'environnement - ce qu'on appelle la problématique des gaz F - est exprimée pour chaque réfrigérant en une valeur GWP ('Global Warming Potential'), avec le CO2 comme référence. Le produit de ceci par le nombre de kilogrammes de réfrigérant résulte dans le nombre de tonnes d'équivalents CO2. Trois limites sont fixées: à partir de 5 tonnes d'équivalents CO2, il faut un contrôle de détection des fuites tous les 12 mois, à partir de 50 tonnes tous les six mois et à partir de 500 tonnes tous les trois mois. Si on utilise un système de détection des fuites permanent, la fréquence de contrôle peut être réduite de moitié."
Quelles en sont les motivations?
Katelijne Schaerlaekens: “La législation stimule de différentes manières la transition vers l'utilisation de réfrigérants de faible valeur GWP. Si cette valeur est plus faible, la contenance peut être plus grande pour une même fréquence de contrôle, ou vous appartenez à une classe de fréquence plus basse. De plus, les producteurs et importateurs de réfrigérants se voient imposer depuis 2015 des quotas HFC et ce plafond sera abaissé systématiquement pendant quinze ans. Ils sont donc encouragés à produire des réfrigérants ayant un plus faible GWP, s'ils veulent encore proposer de grands volumes à leurs clients. Avec ce 'phase down', on crée sciemment une pénurie de réfrigérants à haut GWP, ce qui en fait grimper le prix.
Par conséquent, ils sont moins intéressants d'un point de vue écologique et économique. Enfin, les exploitants d'une installation de plus de 40 tonnes d'équivalents CO2 ne peuvent plus utiliser des réfrigérants nouvellement produits dès 2020; uniquement des recyclés. Pour plusieurs raisons spécifiques, ils ont donc tout intérêt à ce que leur installation ne fuit pas et à respecter strictement les dispositions légales sur les contrôles de détection des fuites."
Qui peut exécuter de tels contrôles de détection des fuites et qu'impliquent précisément leurs tâche?
Claeys: “Ce même règlement européen impose une obligation d'agrément aux techniciens frigoristes qui veulent ajouter ou vidanger des réfrigérants, ou contrôler l'étanchéité aux fuites des installations de refroidissement. Cet agrément est organisé séparément par toutes les régions. Le candidat doit réussir un examen dans un centre de formation agréé au choix. Cet examen comprend des épreuves pratiques, comme le brasage dur et certaines manipulations standard, et des questions théoriques sur la législation et la technique. Après cinq ans, il faut un examen d'actualisation purement théorique sur d'éventuelles modifications dans la réglementation. Le technicien frigoriste, mais aussi l'entreprise de technique de refroidissement qui l'emploie, doit être agréé et peut être audité."
Schaerlaekens: “Lorsque le technicien frigoriste constate une fuite, il doit la réparer dans les 14 jours et contrôler à nouveau dans les 30 jours. La description des méthodes et le résultat des contrôles doivent être inscrits dans un journal de bord, avec le nom du technicien frigoriste agréé. Il doit être tenu à jour par l'exploitant et pouvoir être consulté à tout moment, ceci jusque 5 ans en arrière. Du reste, nous devons pouvoir examiner les attestations de construction chez lui. Dans la pratique, le technicien frigoriste agréé complète ce journal de bord. S'il constate de grands manquements, tels qu'une fuite excédant les 5% annuels légaux, il doit en informer l'exploitant par écrit dans le cadre de son agrément. Enfin, il doit tenir une comptabilité réfrigérant avec les pertes de fuite et les appoints."
PÉNURIE DE TECHNICIENS FRIGORISTES
De nombreux techniciens frigoristes sont et restent nécessaires. Pourtant, le flux entrant de nouveaux travailleurs est quasi inexistant. Le technicien frigoriste est officiellement un métier en pénurie. Sven Claeys, chargé de mission, l'explique par la complexité accrue du job. “Il doit connaître la technique de refroidissement et la technique de réglage. Il doit effectuer toutes les manipulations techniques de façon correcte, connaître la réglementation environnementale et accomplir les obligations administratives requises. De plus, les techniciens frigoristes doivent être disponibles 24 h sur 24 pour des interventions d'urgence chez de grands clients et sur de grandes installations. Ceci les dissuade souvent", dit-on.

Les deux parties portent donc une grande responsabilité?
Schaerlaekens: “Précisément! Pour nous, l'inexactitude du journal de bord est une lourde infraction lors des inspections. Si des infractions sont constatées, un Rapport de Constatation ou procès-verbal peut être rédigé. La sanction dépend de la gravité et de la fréquence des infractions. Ceci peut entraîner par exemple le retrait de l'agrément du technicien frigoriste. Le journal de bord est donc pour nous un important instrument administratif pour les inspections, mais naturellement, il aide aussi le technicien frigoriste dans l'exécution de son travail, pour retrouver l'histoire de l'installation."
Claeys: “L'exploitant a la responsabilité de faire contrôler à temps l'étanchéité aux fuites de son installation selon les obligations de fréquence légales, en plus des éventuels systèmes de détection des fuites permanents qui sont obligatoires pour les installations à partir de 500 tonnes d'équivalents CO2. Les contrôles périodiques avec appareils de mesure mobiles ne doivent pas être fixés par contrat avec le technicien frigoriste, mais ce dernier a tout intérêt à suivre ceci pour son client, voire proposer des contrôles préventifs. Dans cette ère digitale, le journal de bord peut être une application web, le technicien peut aussi envoyer automatiquement un courriel quand un contrôle est nécessaire, et adresser une proposition de révision ou de nouvelle installation en cas de grands manquements."
Existe-t-il des dispositions légales pour les outils et méthodes de détection?
Claeys: “Non, le technicien frigoriste agréé peut choisir les outils avec lesquels il effectue le contrôle de détection des fuites et estimer quelle est la meilleure méthode de détection. Dans VLAREM, il est stipulé que dès qu'une fuite est suspectée, il doit utiliser un détecteur de fuite d'une sensibilité minimale de 5 g par an. Du reste, le Département Contrôle de l'Application dispose aussi de détecteurs de fuite mobiles, pour effectuer un contrôle de détection des fuites. Les inspections ne sont donc pas purement administratives."
Quel est votre message final?
Schaerlaekens: “Nous inspectons les contrôles de détection des fuites depuis 1998 et ces dernières années, nous avons contrôlé 150 à 250 installations de refroidissement par an. Nous ne voyons aucune raison de supprimer cette activité; ces inspections environnementales restent une priorité. Nous observons que la sensibilisation ou l'application ne suffit pas; en tant qu'autorité publique, nous devons continuer de nous engager dans les deux volets de notre politique. En fait, une bonne nouvelle pour les techniciens frigoristes, qui ont la garantie de conserver leur travail!"
Vous trouvez plus d'informations sur la législation et les agréments sur le site web www.lne.be.