La nouvelle commande numérique offre bien plus de possibilités
La nouvelle génération de commandes numériques joue un rôle plus important dans le processus d'usinage
La pénurie de travailleurs qualifiés frappe de nombreux secteurs dans tous les pays occidentaux. Notamment l'industrie métallurgique. L'automatisation est considérée comme l'une des solutions possibles. Non seulement sous la forme d'un chargement par robot mais aussi par le biais d'un logiciel qui prend en charge certaines tâches de l'opérateur. Ou qui simplifie la programmation d'une machine, de sorte que le fonctionnement de base nécessite moins de connaissances spécialisées. La nouvelle génération de commandes numériques joue un rôle plus important.
En effet, les fabricants de machines placent de plus en plus souvent leur propre enveloppe sur la commande numérique et proposent des applications qui automatisent certaines tâches. Cela va des cycles d'usinage spécifiques, par exemple pour le fraisage de dents, aux macros ou à la simulation d'usinage. Mais il peut également s'agir d'un logiciel spécifique qui prend en charge certaines tâches de contrôle de l'opérateur de la machine, de sorte qu'il ne doit pas surveiller constamment le processus ou que la surveillance continue pendant l'usinage sans personnel.
Le défi consiste à remplacer l'humain par des logiciels
Un exemple est l'option proposée dans plusieurs commandes pour ajuster automatiquement l'alimentation (Adaptive Feed Control). Lorsque cette fonction est activée, la commande calcule le rapport optimal entre l'avance et la charge sur la broche et l'outil puis ajuste l'avance en conséquence. Souvent, ces applications utilisent des signaux que la machine génère déjà, parfois des capteurs spécifiques sont ajoutés. La détection du broutage et le réglage des paramètres de coupe en sont un autre exemple. L'opérateur doit moins s'en préoccuper. Abaisser le seuil pour pouvoir commander une machine est une question importante pour presque tous les développeurs de machines CNC. Surtout avec les commandes d'entrée de gamme, les développeurs essaient de maintenir le niveau de connaissances requis aussi bas que possible en faisant en sorte que le logiciel prenne en charge davantage de tâches.

L'assurance qualité grâce aux données
La tendance générale est à l'amélioration des processus grâce aux nouvelles commandes. Lors de l'AWK 2021, le colloque triennal de l'industrie de la machine-outil à Aix-la-Chapelle, une présentation du Boston Consulting Group a utilisé ça comme argument en faveur d'une nouvelle génération de systèmes de commande. L'idée est d'exploiter les données pour améliorer les processus. Cela pourrait améliorer considérablement l'efficacité globale de l'équipement (OEE), en moyenne d'environ sept points de pourcentage. L'industrie manufacturière, en particulier, est confrontée au problème suivant: le contrôle de la qualité ne peut être effectué qu'après coup parce que pendant le processus, on ne peut pas lire et traiter les données ni utiliser directement les résultats pour ajuster le processus. L'exemple donné était le soudage, mais cela s'applique tout aussi bien à l'usinage. Si l'on mesure la puissance du processus en temps réel pendant le soudage manuel, on peut se baser là-dessus pour prédire correctement la qualité.
L'intelligence artificielle franchit de nouvelles étapes dans les commandes numériques
Les ingrédients à cet effet sont déjà là. Le défi consiste à transposer l'oeil du professionnel, qui voit immédiatement si un processus se déroule bien ou non, dans des logiciels. Le jumeau numérique jouera un rôle essentiel à cet égard. A Aix-la-Chapelle, par exemple, on a construit un banc d'essai pour effectuer l'assurance qualité d'un blisk (un disque de turbine pour un moteur d'avion qui est fraisé d'une seule pièce) pendant le processus de fraisage CNC. Pour ce faire, le logiciel transpose la lecture des données de la machine dans un jumeau numérique. Celui-ci est comparé au modèle CAO d'origine, ce qui permet de se prononcer sur la qualité de la pièce fraisée. Dans l'aviation, mais aussi dans l'industrie médicale, cela peut entraîner des économies considérables. Dans ces secteurs, les coûts liés à l'assurance qualité peuvent représenter jusqu'à un quart des coûts totaux de production.

Intelligence artificielle
L'intelligence artificielle fait également son entrée dans les nouvelles générations de commandes numériques. Par exemple, elle se souvient des réglages effectués par l'opérateur sur la machine et les prend immédiatement en compte la prochaine fois qu'une telle situation se présente. Ou bien elle apprend des stratégies utilisées et les suggère automatiquement. Une étape assez récente est l'utilisation d'algorithmes de Machine Learning qui, combinés au modèle de la pièce, suggèrent des réglages pour minimiser les influences thermiques sur la précision de l'usinage. Certains experts s'attendent à ce que les progrès de l'intelligence artificielle créent un lien direct entre le logiciel de conception et la commande numérique, le logiciel de fabrication. Surtout si l'utilisation des logiciels dans le cloud augmente, les algorithmes peuvent être utilisés pour améliorer la productivité et optimiser les opérations sous tous les angles.
Le fabricant chinois Beijing Jingdiao, qui construit sa propre commande et son propre logiciel de CFAO pour cette raison précise, a déjà adopté cette approche dans la pratique. Dans la machine, un laser mesure tous les 15° degrés du profil des arêtes de coupe de la fraise. Ce profil est chargé dans la commande. Grâce à l'intégration poussée avec le logiciel de FAO, la commande est capable de corriger chaque point là où c'est nécessaire, en tenant compte de l'usure mesurée de la fraise.
Mazak travaille à l'intégration des fonctionnalités de CFAO dans la commande de la machine d'une manière différente. 3D Assist facilite la programmation d'un modèle 3D en permettant de lire le modèle 3D et de programmer facilement les opérations. Avec la nouvelle Smooth Ai, Mazak va encore plus loin en rendant la programmation de certaines pièces hautement automatique. Il facilite également la création d'un jumeau numérique de l'opération à partir de la commande et la synchronisation de la machine avec le logiciel Smooth CAM pour un serveur de bureau.

Android pour l'industrie CNC
Autodesk prend également la direction des commandes de machine. Le développeur de CFAO a l'ambition de faire dans le secteur de la machine-outil ce que Google a fait avec Android sur le marché des smartphones. L'Autodesk Machine Control Framework (AMCF) est un cadre open source qui sert de lien entre le software de CFAO et le hardware des machines CNC. Cela crée un système en boucle fermée. En d'autres termes, à l'heure actuelle, le CFAO et le matériel ne communiquent pas entre eux de manière native.
Chaque programme de FAO doit d'abord passer par le post-processeur de chaque machine spécifique. Avec la nouvelle interface homme-machine basée sur un navigateur, Autodesk veut créer un lien direct entre la machine et le logiciel de CFAO. Grâce à des API (interfaces numériques), des solutions tierces peuvent également fonctionner sur la plateforme, à l'instar des applications d'un smartphone. AMCF convertit les trajectoires d'outils des fichiers de CFAO en signaux pour le contrôleur de la machine. Le contrôleur, quant à lui, envoie des données en temps réel sur la base desquelles un jumeau numérique peut être créé. Le logiciel de CFAO s'appuie sur ces données pour inspecter les pièces, par exemple, et ajuster le programme si nécessaire, comme cela se fait à Aix-la-Chapelle. Le système est encore en cours de développement. Cependant, il s'agit d'une indication claire de la direction dans laquelle la technologie de commande va se développer.

Déterminer la rugosité de la surface de manière virtuelle
Ce qu'Autodesk souhaite réaliser en tant que solution open source est déjà en partie une réalité chez Siemens, mais au sein de la plateforme logicielle industrielle du groupe. La commande Sinumerik One introduite il y a deux ans est digital native. Cela signifie que cette commande a été conçue de A à Z pour l'ère numérique. Sinumerik permettait déjà la programmation et le contrôle d'un robot mais avec cette nouvelle commande, ces fonctions sont davantage intégrées. La détection des collisions fait désormais partie de Sinumerik One. La nouvelle commande présente des avantages pour les constructeurs de machines, qui peuvent tester les choses virtuellement pendant le développement. Les utilisateurs de la machine peuvent enregistrer et analyser tous les mouvements pour voir où il est possible d'améliorer l'efficacité. A cet effet, on utilise des ordinateurs de type Industrial Edge.
Ces données sont traitées en dehors du système de contrôle. Les solutions les plus récentes vont tellement loin que la rugosité de la surface de la pièce peut être évaluée avant même que la pièce ne soit fabriquée sur la machine. Le logiciel utilisé par Siemens à cet effet fonctionne également avec les données de processus générées par le fraisage pneumatique. Les utilisateurs peuvent acheter les solutions logicielles nécessaires à cet effet dans le nouveau Machine Tool Software Store, la boutique en ligne.

La commande numérique n'est donc plus seulement destinée à piloter les différents axes d'une machine-outil et à en contrôler les mouvements sur base de la géométrie programmée de la pièce et des paramètres de fraisage. La nouvelle génération de commandes numériques va jouer un rôle déterminant dans l'ensemble du processus de fabrication, y compris l'optimisation et l'assurance qualité.